LA Justice, un vrai boulet…
Depuis 2007, le discours royal évoque pour la troisième fois l’urgence de la réforme.
Grande ou petite? Son contenu sera «annoncé prochainement». Car le ministre la Justice, Abdelwahed Radi, a entamé depuis des mois déjà des consultations. «Nous avons rendu nos conclusions à SM le Roi», déclare le ministre de la Justice. Elles vont servir de base à la future charte de la justice. Le 4 septembre 2008, une commission interministérielle a été formée lors d’un conseil du gouvernement pour préparer les procédures et les thèmes de cette feuille de route. Début mai, les parlementaires ont donné leur avis via la Commission de la justice, la législation et les droits de l’homme. Partis politiques, syndicats, associations professionnelles auraient également formulé leurs opinions. L’Instance centrale de prévention contre la corruption a été sollicitée notamment. La société civile a pris pour sa part les devants: un mémorandum -«Réforme de la justice au Maroc»- a été déjà rendu public le 6 avril dernier. Il y a aussi une panoplie de rapports, Livre blanc de la CGEM ou celui sur la Politique européenne de voisinage, qui soulignent l’urgence de la réforme. Il y a donc de quoi secouer non seulement un ministère mais tout un gouvernement. Vu le retard accumulé depuis des années, la future réforme doit être radicale pour ne pas décevoir.
· Plus de proximité
Dans son programme 2008-2012, le ministère de la Justice prévoit de bâtir 22 juridictions: quatre cours d’appel et 18 tribunaux de première instance.
Les futures instances vont reconfigurer la carte judiciaire. La dernière modification remonte au milieu des années 70.
Pas de «Palais de justice» au Maroc. Il s’agit là d’un pôle judiciaire qui regroupe plusieurs types de tribunaux (droit commun, commercial…). Qu’est-ce que cela implique pour les justiciables?
Si l’on prend uniquement le cas du tribunal de première instance de Casablanca, le constat est alarmant. Cette juridiction est éclatée sur plusieurs zones géographiques: affaires familiales au quartier Al Habous, affaires délictuelles et criminelles à Aïn Sbaâ et boulevard des FAR (en face de l’ex-Comanave), affaires de droit commun et administratif à Anfa… Ce qui ne facilite pas la tâche aux auxiliaires de la justice notamment les avocats. D’autant plus que ces derniers traitent plusieurs dossiers à la fois (commercial, civile, administratif…). Sans parler des embouteillages, l’avocat est souvent amené à jongler avec les horaires des audiences et qui commencent en principe à 9 heures.
La formule de «Palais de justice» est donc plus judicieuse au moins dans les grandes villes. Il y a une économie de temps et d’énergie! En revanche, le ministère de la Justice doit dénicher d’autres ressources budgétaires et des terrains plus grands…
· Les procès qui annoncent la fin des vacances
L’affaire des minotiers reprend le 19 septembre à Casablanca. Ghali Sebti, ex-président de l’Association professionnelle des minotiers, fait figure d’accusé principal. Son procès pour «dilapidation de deniers publics» redémarre devant la chambre criminelle de la Cour d’appel de Casablanca. De par son ampleur, il inaugure la fin des vacances judiciaires. Sa comparution devant le tribunal date du 5 février 2008. Car Sebti avait déjà été condamné par contumace à 15 ans de prison ferme.
Le CIH bien sûr. Une des plus grandes affaires de moralisation de la vie publique lancée à l’époque de l’ex-Premier ministre, Abderrahman Youssoufi. Le scandale a éclaboussé de grands noms du monde de la finance. Moulay Zine Zahidi, ex-PDG de l’établissement, en fait partie. Il a été également jugé par contumace à 10 ans de prison ferme. La réouverture du procès est prévue pour le 21 septembre.
Il y aussi l’affaire Beliraj. Elle porte le nom du cerveau présumé du réseau terroriste. Il a été condamné à perpétuité pour «atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat» entre autres. La défense compte faire appel après sa condamnation par le tribunal chargé des affaires de terrorisme à Salé. Le «procès des bidonvilles en dur» a de fortes chances de passer en appel. Il s’agit d’un réseau d’habitat informel à Lahraouiyine et Chellalat dans les environs de Casablanca. 63 personnes condamnés: des «promoteurs», agents d’autorité, fonctionnaires…
100.000 contentieux commerciaux
LES juridictions commerciales -créées en 1997- tranchent un peu plus de 100.000 contentieux par an. Ce volume ne concerne que les tribunaux de commerce. En appel, les juges ont tranché plus de 9.000 litiges. Ce sont des chiffres modestes si on les compare à ceux des juridictions de droit commun. Est-ce parce que le monde des affaires est réticent à l’égard de la justice? Notons que la carte judiciaire compte trois cours d’appel et 8 tribunaux de commerce. En 2008, les juridictions administratives de premier degré se sont prononcées sur 13.400 affaires et les cours d’appel ont jugé presque 3.000 dossiers.
Les notaires atteints par la baisse de l’immobilier
DANS d’autres professions, notamment les traducteurs assermentés, la période des grandes vacances est synonyme de haute saison. L’arrivée, plus ou moins massive des MRE, en est pour quelque chose. «Acte de mariage et de divorce, contrat de vente… font partie des actes qui sont quotidiennement traduits.
Tous les documents requis pour la procédure de regroupement familial, tels que le casier judiciaire et l’attestation de vie, sont également concernés», précise Mohammed Jaidi, secrétaire général de l’Association des traducteurs assermentés. Dans un gros cabinet, le chiffre d’affaires oscille entre 3.000 et 5.000 dirhams par jour. En outre, ils sont assez rares à avoir un portefeuille aussi costaud. Il faut déduire de ce chiffre des documents sous-traités chez d’autres cabinets. Contrairement à 2008, la saison actuelle s’avère beaucoup moins fructueuse. L’on parvient difficilement aux 3.000 DH. Chez les notaires, la baisse d’activité de certaines études est due beaucoup plus à la conjoncture du secteur immobilier qu’aux vacances judiciaires. C’est d’autant plus vrai que dans le notariat on ne traite pas de contentieux.
Prudent, Me Nouredine Skouked reconnaît à demi-mot la baisse de l’immobilier. «Les temps sont dures»: seuls les notaires ayant des conventions avec de grands groupes immobiliers -logements économiques surtout- tirent leur épingle du jeu. Même son de cloche chez son confrère, M’bark Sbaghi, qui souligne que «depuis 8 mois, le rythme d’activité a baissé de 50%. Certains promoteurs trouvent des difficultés à liquider leurs appartements». Quant au MRE, ce ne sont pas une «bouée de sauvetage pour les cabinets d’études». Leur chiffre d’affaires dépend surtout du portefeuille clients stable.
Faiçal FAQUIHI