L’activité de l’exploitation des carrières n’échappe pas à l’informel et à des pratiques illégales. Pour mettre de l’ordre dans le secteur, le gouvernement avait promulgué en 2002 la loi 08-01, relative à l’exploitation des carrières. Mais la loi n’a jamais pu être appliquée sur le terrain faute d’un texte d’application. La loi ne faisait pas non plus l’unanimité auprès des différents opérateurs. Des tractations avaient été menées entre le ministère de l’Intérieur et la Fédération nationale des BTP (FNBTP). Et au cours de l’été dernier, des opérateurs ont constitué l’Association des producteurs de granulats pour appeler à une grève le 10 juin dernier. En cause, certaines conditions jugées rédhibitoires pour les professionnels, telles que le versement d’une caution bancaire, etc. Mais la grève n’a pas eu lieu finalement. Les discussions entre la FNBTP et les pouvoirs publics ayant abouti à un accord. Une circulaire a été publiée le 14 juin par le Premier ministre. «Elle a pour objectif de préciser les modalités d’ouverture d’une carrière et de clarifier les procédures d’attribution», explique Abdelaziz Dahbi, président de l’Association marocaine des routes. La circulaire instaure une autorisation préalable sur la base d’un cahier des charges. La circulaire prévoit également la rationalisation de l’exploitation des carrières de sable ainsi que la mise en place d’outils de contrôle et de suivi des activités des exploitants de carrières. Des mesures visant à interdire les carrières sauvages et à prévenir le pillage du sable ont également été prévues. En fait, il s’agit de mesures transitoires prises en attendant l’adoption d’une nouvelle loi relative à l’exploitation des carrières. Une loi qui, selon l’exploitant d’une carrière, serait sur la table du Secrétariat général du gouvernement. Elle viendrait remplacer la loi 08-01 de 2002.
Parmi les documents exigés pour l’ouverture d’une carrière, une étude d’impact environnemental, délivrée par le ministère de l’Equipement et du Transport (MET) ou ses directions régionales. Si une carrière est située sur le domaine public maritime, l’exploitant devra respecter les dispositions légales (loi 10-95 et le décret 2.97.489) relatives à l’eau. Les dossiers sont déposés contre récépissé auprès des services du MET. L’autorisation est délivrée après étude par la Commission provinciale des carrières. Dans les cas des carrières situées sur le domaine public appartenant aux Eaux et Forêts, au ministère des Habous, aux terres collectives, le récépissé de déclaration n’est délivré qu’après signature d’un contrat de bail ou lobtention des autorisations nécessaires.
Pour rationaliser les carrières, la circulaire interdit l’ouverture de nouvelles carrières à moins de 500 mètres des sites protégés, des environs ou autour des infrastructures de base ou près des équipements publics. Les opérateurs doivent également respecter l’environnement ainsi que les conditions de sécurité d’exploitation et de contrôle. Les carrières devront être reliées au réseau routier par une voie convenable à la circulation des camions, comportant la signalisation nécessaire. De plus, un mur de clôture devra être édifié autour de la carrière. Le site d’exploitation doit également comporter une plaque signalant la nature de l’activité, le numéro et la date d’autorisation. Il doit être équipé d’un pont bascule pour contrôler les volumes de sable extraits. Une mesure destinée à instaurer la transparence dans les rentrées des professionnels. La provenance du sable fait également partie des éléments contrôlés. Ainsi, il est interdit d’extraire du sable de dunes situé dans le patrimoine forestier, au domaine public, les plages…
Un contrôle périodique est prévu, via des photos aériennes et les satellites pour suivre l’évolution des sites et déterminer ceux qui font l’objet d’une surexploitation. Le texte prévoit également la création d’une commission au niveau national et régional des carrières ainsi que d’équipes chargées du contrôle dans les régions. Ces équipes peuvent effectuer des visites in situ pour vérifier le respect des dispositions de la loi. En l’absence d’un observatoire, la commission nationale des carrières procédera à des études pour évaluer les besoins du marché en matériaux de construction.
Polémique
Si la loi 08-01 traite de l’exploitation des carrières en général, la circulaire de la Primature, elle, porte uniquement sur celles dédiées à l’extraction de sable. «Au moment où l’on s’attendait à la publication des textes d’application de la loi sur l’exploitation des carrières, nous avons été surpris par cette circulaire du Premier ministre», déclare un membre de l’Association des producteurs de granulats, qui requiert l’anonymat. De plus, selon cet opérateur, «contrairement à une loi, une circulaire n’est pas opposable au tiers». Toujours est-il que la circulaire intervient dans un contexte d’élaboration de la Charte nationale de l’environnement.
Hassan EL ARIF