Nouvelle loi sur la VEFA : beaucoup de bruit pour rien !

Nouvelle loi sur la VEFA : beaucoup de bruit pour rien !

Publié le : - Auteur : la vie économique

Alors que le processus d’amendement de la loi sur la Vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) a déchaîné les passions parmi les associations de protection des consommateurs, les promoteurs et les notaires, le soufflé est brutalement retombé après l’adoption du nouveau texte en mars dernier. Pourtant, jusqu’aux dernières étapes précédant la validation de la nouvelle loi, beaucoup de points de discorde persistaient, les promoteurs immobiliers notamment, réunis sous la bannière de leur fédération (FNPI), soutenaient que la nouvelle réglementation était inapplicable et qu’elle n’allait pas changer grand-chose aux pratiques existantes. Quel est donc le bilan des courses, plus de 9 mois après l’entrée en vigueur du nouveau cadre ?
Disons-le d’emblée, on est loin d’un bouleversement des habitudes. «Quelques opérateurs se plient effectivement aux obligations de la VEFA remaniée et ont bien intégré le nouveau dispositif dans leur politique commerciale», constate-t-on auprès de la FNPI. «Mais il ne s’agit généralement que de promoteurs d’une certaine taille ayant la capacité de mettre en place l’organisation requise. Les développeurs de moindre envergure continuent à effectuer des ventes comme par le passé», tempère-t-on. La majorité écrasante des opérateurs ignore donc la loi, explicitent les notaires.
Une fois n’est pas coutume, les professionnels ne réclament pas un nouvel amendement de la réglementation pour revoir leurs pratiques. Ils sont simplement en attente de dispositions complémentaires qui permettraient de boucler la boucle pour le nouveau cadre. Ils réclament d’abord la publication du décret d’application sur la garantie d’achèvement des travaux. Il s’agit d’une caution que les promoteurs doivent souscrire auprès des banques, selon la nouvelle loi, pour faire face aux cas où le vendeur se heurte à des entraves (problèmes financiers ou autres) susceptibles de compromettre l’achèvement du projet immobilier objet du contrat. «En l’absence d’un décret sur la garantie d’achèvement des travaux, qui est une disposition majeure de la VEFA remaniée, on se pose des questions sur l’opposabilité de la nouvelle réglementation», estime la FNPI.
La Conservation foncière planche sur la question du transfert progressif de propriété
Surtout, les promoteurs comme les notaires jugent vitale la mise en place d’un système de transfert de propriété progressive au Maroc, pour permettre une réelle généralisation de la VEFA.
Ce chantier, nécessairement lourd, puisqu’il requiert une refonte de la réglementation relative à la conservation foncière, a justement été mis sur les rails sur les derniers mois par l’Agence nationale de la conservation foncière (ANCFCC) qui planche sur la question en collaboration avec le secteur bancaire. Tout le monde y gagnera, selon les professionnels. Pour les acquéreurs d’abord, le transfert progressif de propriété devrait leur faciliter l’accès au financement bancaire. Dans la nouvelle loi, un acheteur est en effet amené à payer jusqu’à 70% du prix du bien, par avances successives, avant d’en arriver à la remise des clés. Ce qui complique la manœuvre, c’est que l’acheteur ne peut solliciter un financement bancaire pour couvrir ses versements du fait qu’il n’a pas la possibilité de fournir de garanties, le bien n’étant pas encore achevé. Avec le nouveau mécanisme, les titres parcellaires sur plan pourront être créés au fur et à mesure de l’avancement du projet et la banque qui prête des fonds pour financer des avances pourra y inscrire ses droits. Le nouveau mécanisme pourrait également mieux protéger les acheteurs contre les promoteurs véreux. Il permettra en effet l’inscription de leurs droits sur des fractions divises des biens qu’ils achètent dès la réservation et au fur et à mesure de la livraison, expliquent les notaires. Un promoteur mal intentionné ne pourra ainsi plus vendre un même bien à plusieurs acheteurs puisqu’il sera possible de vérifier à tout moment qu’aucune cession n’a eu lieu auparavant, explicitent les professionnels.
Pour leur part, les promoteurs gagneraient en sécurité du fait que l’acquéreur, en cas de litige, ne sera plus amené à prénoter le titre mère de tout le programme commercialisé en VEFA, comme c’est le cas actuellement, mais il ne pourra agir que sur la fraction relative à son bien. Les garde-fous introduits par le transfert progressif de propriété devraient ensuite renforcer la confiance autour des promoteurs immobiliers, ce qui faciliterait leur accès aux cautions bancaires, selon les spécialistes.
La caution bancaire toujours problématique
Ce dernier point constitue justement le principal écueil limitant le développement de la VEFA, de l’avis des opérateurs. «Jusqu’à présent les banques n’ont pas adhéré au principe de caution bancaire, en raison des risques encourus en cas de défaut. Elles ne suivent que lorsqu’il s’agit de grands opérateurs qu’elles connaissent bien», rapporte-t-on auprès de la FNPI. Reste que même si les banques se montrent à l’avenir plus volontaires, les promoteurs restent limités par d’autres facteurs. «Les cautions viennent naturellement en diminution des lignes de trésorerie accordées aux promoteurs, des opérateurs qui ont des difficultés à se financer auront donc du mal à sacrifier une partie de leur capacité d’endettement pour offrir les garanties requises», explique la FNPI. Aussi, il y a fort à parier que les promoteurs se basant sur un financement sur fonds propres, qui refusent généralement le recours à l’intermédiation de la banque, ne solliciteront pas de caution même si les banques sont plus disposées à en accorder. Cela porte à croire qu’au delà des ajustements réglementaires, bien d’autres conditions structurelles devront encore être réunies pour que la VEFA trouve sa voie sur le marché national.
Par REDA HARMAK

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