Un texte qui corse l’accès à la profession, renforce le monopole des avocats et resserre l’étau sur les cabinets étrangers.
La refonte de la loi régissant la profession d’avocat est dans le pipe. L’Association des barreaux du Maroc s’apprête à examiner une nouvelle mouture transmise par le ministère de la Justice. Son avis est attendu dans une semaine. Il s’agira de se concerter sur une version finale, qui sera ensuite convertie en avant-projet de loi.
Le texte actuel remonte à 2008. Il a été légèrement amendé en 2011. Mais une modification de fond est attendue depuis 2013 et la charte de la réforme de la Justice. L’une de ses recommandations portait sur la révision du « niveau du diplôme scientifique requis pour participer aux examens d’accès à la profession d’avocat. » Il était également question d’agir sur le régime de l’examen d’accès à la profession d’avocat, la durée du stage, etc.
Parcours du combattant
Selon les indiscrétions recueillies par nos soins, la mouture proposée par le ministère va dans ce sens.
Un parcours du combattant « destiné à sélectionner les meilleurs compétences », explique-t-on du coté de la profession. Actuellement, les lauréats d’une licence en droit peuvent directement participer à un examen d’aptitude lancé par le ministère, suivi d’un stage de trois ans au bout duquel ils peuvent exercer en tant que titulaires.
Avocats étrangers : examen obligatoire auprès du barreau
Les ressortissants étrangers peuvent également concourir à l’accès à la profession. Mais leur pays doit être lié au Royaume par une convention reconnaissant aux nationaux des deux Etats le droit d’exercer la profession d’avocat dans l’autre.
Le texte apporte une nouveauté qui risque de faire parler. Elle concerne les avocats étrangers désirant exercer sur le territoire marocain. Ces derniers doivent d’abord justifier de l’existence d’une convention entre leurs pays et le Royaume. Ensuite, ils doivent passer et réussir un examen organisé par le barreau marocain auprès duquel ils voudraient s’inscrire. Les candidats seraient notamment testés sur leurs connaissances en langues arabes, ainsi que les procédures et lois marocaines. Ils doivent, enfin, établir leur démission du barreau étranger auquel ils étaient inscrits.
Une disposition qui rappelle l’interminable polémique autour des firmes internationales basées à Casablanca, régulièrement accusées par les locaux de concurrence déloyale.
Officialiser le monopole sur le conseil juridique
Le champ d’intervention des avocats fait également figure de sujet chaud. Et selon nos informations, le futur texte tend à établir leur monopole sur des activités convoitées par d’autres professions juridiques.
A titre d’exemple, il s’agira d’octroyer aux robes noires l’exclusivité du « conseil » et « des consultations juridiques ». Mais aussi celle de la rédaction des contrats « relatifs à la constitution des sociétés et à l’augmentation ou réduction du capital ».
Dans le même registre, la version du ministère tend à instaurer, pour les sociétés tenues d’avoir un commissaire aux comptes, une obligation de conclure un contrat avec un avocat ou plusieurs en tant que conseillers juridiques.
Le texte exige la signature d’un avocat sur les contrats sous-seing privé, leur enregistrement dans les administrations d’enregistrement et de timbre, leur inscription dans les registres de commerce ou auprès de la conservation foncière. A défaut, ces actes seraient considérés comme « nuls ».
Par : A.E.H