Les activités de paiement ne seront plus la chasse gardée des banques. Bank Al-Maghrib vient de publier deux circulaires au Bulletin officiel (n° 6548 du 2 mars 2017), cassant un monopole qui était jusque-là entre les mains des banques.
La première circulaire, homologuée via un arrêté du ministère des Finances, régit l’exercice de l’activité et définit les responsabilités et le mode de gouvernance des établissements de paiement. La principale nouveauté du texte concerne la réduction du capital minimum pour exercer l’activité. Désormais, il suffit de disposer d’un capital de 10 millions de DH au lieu de 30 millions de DH.
L’autre apport de la circulaire consiste en l’allègement en matière de mécanismes de gestion, de schéma de distribution des services…
Ainsi, les cartes de paiement ne devront plus obligatoirement être adossées à des comptes bancaires, mais à des comptes de paiement. Au niveau de l’architecture de distribution, l’établissement de paiement pourra s’appuyer sur un master franchisé et des détaillants. La libéralisation des services de paiement devrait permettre d’accélérer l’inclusion financière d’un plus grand nombre d’usagers. Il faut savoir que, selon une étude menée par la Banque mondiale avec Bank Al-Maghrib en 2014, quelque 13 millions d’actifs restent exclus du secteur bancaire. La Banque mondiale avait recommandé de renforcer la stratégie nationale d’inclusion financière via la facilitation de nouveaux opérateurs indépendants et l’amélioration de la capacité financière des Marocains.
De manière générale, la prestation du paiement consiste à obtenir une carte pour transférer ou recevoir de l’argent du Maroc et de l’étranger moyennant le respect des dispositions réglementaires en matière de change. La carte électronique sera délivrée par l’établissement de paiement. Ce qui change maintenant, c’est que cette carte ne sera pas adossée à un compte bancaire, mais à un compte de paiement hors du circuit bancaire.
Le transfert de fonds peut s’effectuer à travers trois canaux: une application mobile, le guichet automatique bancaire (GAB) ou un compte en ligne.
Multiservices, la carte permet d’effectuer toutes sortes de paiements tels que les impôts, les factures de téléphone, la vignette automobile… Elle peut également être cobrandée pour une institution telle qu’une université, par exemple. Dans ce cas, elle peut servir comme pièce d’identité, ou moyen de paiement, etc.
En principe, la carte s’adresse à des personnes physiques. Mais elle peut également être utilisée par des institutionnels, à condition que ce soit justifié par des documents: une entreprise peut acheter, par exemple, un lot de cartes et les distribuer à ses employés comme moyen de virement des salaires.
La circulaire fixe à 80.000 DH le montant maximum qui peut être crédité sur le compte d’une carte. Un client a droit à trois cartes par CIN. La carte de paiement peut également servir pour payer des achats via les TPE classiques.
BAM a fixé trois plafonds de paiement: 200 DH à 20.000 DH. Les conditions d’ouverture d’un compte sont fonction du montant d’argent que l’on peut transférer par mois. Les justificatifs vont de la simple copie d’une carte d’identité nationale à une preuve de revenus et de résidence.
Naps, précurseur
Pour l’heure, seule Naps, filiale du groupe M2M, se positionne sur l’activité du paiement. C’est donc la seule structure qui profitera des dispositions de la nouvelle réglementation en matière de paiement électronique. Pour avoir anticipé la publication des circulaires de BAM, Naps devrait déployer ses services vers fin avril. La bataille ne s’articulera pas sur les prix, mais plutôt sur le contenu technologique de l’offre, la transparence en matière de tarifs, de commissions, de frais de services… Naps ambitionne de s’accaparer 25% du parc national des cartes de paiement à l’horizon 2020 et d’élargir son réseau de terminaux de paiement à 60.000 unités, soit 50% de parts de marché. Elle cible les personnes non bancarisées, les jeunes, le commerce de proximité. Mais elle ne tardera pas à être concurrencée par d’autres opérateurs, notamment les banques, les opérateurs télécoms et autres sociétés de financement. Plusieurs demandes d’agréments devraient être déposées à partir de ce lundi 6 mars.
Par Hassan EL ARIF
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