Pourtant, les désaccords concernent d’autres dossiers, notamment l’arbitrage. Introduit par le code du travail en 2004, l’arbitrage n’a cependant pas encore été mis en œuvre. En effet, la loi prévoit le recours à un arbitre si toutes les tentatives de conciliation entre les parties d’un conflit n’ont pas donné de résultats concrets. Le hic, c’est que la liste des arbitres n’a pas encore été fixée en raison de divergences entre les acteurs sociaux. Résultat: l’arbitrage n’a pas encore été mis en œuvre quatre années après l’entrée en vigueur du code. Et le statu quo pourrait encore perdurer pendant plus de temps. «Cette situation fait que plusieurs dossiers relatifs à des conflits collectifs restent toujours en suspens pendant une durée prolongée, alors que l’arbitrage est censé aider les parties en conflit à trouver plus vite une solution sans passer par un tribunal», affirme un inspecteur du travail. Ces dernières années, le recours à l’arbitrage a gagné du terrain.
De même, la majorité des contrats et des accords conclus notamment dans le cadre du PPP (Partenariat public-privé) prévoient un recours à un arbitre en cas de conflit pour éviter la lourdeur des démarches dans les tribunaux. C’est dans ce sens que le code du travail a introduit le concept de l’arbitrage dans le règlement des conflits collectifs. Dans la législation du travail, l’arbitrage est plutôt considéré comme un ultime recours. Grosso modo, les lois prévoient trois étapes dans le règlement des conflits collectifs. En effet, les parties ayant échoué à trouver un accord devant l’inspection du travail ainsi que les deux commissions (provinciale et nationale) d’enquête et de conciliation, vont s’adresser à un arbitre. Ainsi, le président de l’une de ces commissions est chargé de soumettre le dossier relatif au conflit collectif du travail à l’arbitre. Mais dans les faits, la réalité est tout à fait différente puisque les arbitres n’ont pas été nommés et le recours à un arbitre pour trouver un compromis est impossible.
La mise en œuvre de l’arbitrage bute essentiellement sur un manque de consensus autour des personnes éligibles. Certes, le ministre de l’Emploi a le dernier mot pour nommer les arbitres mais il doit prendre en considération les propositions des autres acteurs sociaux. Selon l’article 568 du code du travail, l’arbitrage est confié à un arbitre choisi en commun accord par les parties, sur une liste d’arbitres fixée par un arrêté du ministre de l’Emploi.
Cette liste est établie sur la base des propositions des organisations professionnelles des employeurs et des organisations syndicales des salariés les plus représentatives. La tâche n’est donc pas du tout aisée, sachant que les responsables doivent tenir en compte dans l’établissement de cette liste de l’autorité morale des candidats, de leur compétence et de leur spécialisation dans les domaines économique et social.
Cela explique en quelque sorte le retard dans l’établissement d’une liste des arbitres qui est révisée une fois tous les trois ans par le ministère de l’Emploi. «Je pense que les responsables vont attendre jusqu’à la fin des élections des délégués de salariés prévues courant 2009 pour rouvrir ce dossier, puisque les syndicats les plus représentatifs ont un rôle à jouer. Il est certain que les prochaines élections vont changer la donne et il est donc probable que les responsables attendent les résultats avant de trancher…», croit savoir un inspecteur du travail.
En tout cas, la mise en œuvre de l’arbitrage n’est pas pour demain.
A plusieurs reprises, des informations circulaient sur la création d’une liste des arbitres mais il s’est avéré, par la suite, qu’il s’agissait seulement de rumeurs sans fondements. Nous avons contacté à plusieurs reprises la direction du travail au sein du ministère de l’Emploi, mais nous n’avons pas eu de réponse sur ce sujet qui est loin encore de connaître un dénouement tout comme le dossier sur le travail temporaire.
————————————————————–
Pour l’accomplissement de sa mission, l’arbitre dispose des mêmes attributions que celles du président de la commission provinciale d’enquête et de conciliation. Par ailleurs, les parties doivent offrir toutes les facilités, produire tous les documents et fournir tous les renseignements se rapportant au conflit, à la demande de l’arbitre. Ce dernier statue conformément aux règles de droit sur les conflits collectifs du travail concernant l’interprétation ou l’application des dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles. Le ministre chargé de l’Emploi désigne un arbitre de la liste dans un délai de quarante-huit heures si les parties ne parviennent pas à un accord sur le choix de l’arbitre pour une raison quelconque. Après sa désignation, l’arbitre convoque les parties dans un délai maximum de 4 jours. Sur les conflits collectifs du travail non prévus par des dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles, l’arbitre se prononce, conformément aux règles d’équité. De même, il prononce sa décision dans un délai ne dépassant pas 4 jours à compter de la comparution des parties devant lui.
Par Mohamed Badrane